Exister face à l’Intelligence Artificielle

par | 2 Nov, 2020 | realite augmentee | 0 commentaires

« L’IA a 90% de chances d’avoir rejoint notre niveau d’intelligence en 2080 »[i]

« Grand mythe de notre temps »[ii], l’Intelligence Artificielle réunit de nombreuses sciences et technologies humaines avec pour objectif de simuler l’Intelligence. L’Intelligence Artificielle nécessite ainsi de comprendre de quoi est fait l’intelligence en général, celle des humains, des animaux, même d’envisager d’autres formes d’intelligences. L’intelligence n’est pas exclusivement liée à l’humain ni même à la vie. L’intelligence se définit communément comme un ensemble de processus retrouvés dans des systèmes, plus ou moins complexes, vivants ou non, qui permettent de comprendre, d’apprendre ou de s’adapter à des situations nouvelles. L’intelligence a été décrite comme une faculté d’adaptation, c’est-à-dire une faculté d’apprentissage permettant de s’adapter à l’environnement ou au contraire, la faculté de le modifier pour l’adapter à ses propres besoins. Ainsi, humains, animaux, plantes ou encore outils informatiques font preuve de formes d’intelligences. La définition même de l’intelligence fait l’objet de débats scientifiques, philosophiques car plus l’Homme fait grandir sa réalité observable plus il se rend compte que l’intelligence peut se cacher et s’exprimer en toutes choses. Encore aujourd’hui, le concept d’Intelligence reste mal défini et n’obtient pas de consensus clair au sein des communautés scientifiques[iii]. Mais la définition qui réunit toutes les autres demeure celle qui qualifie l’Intelligence de comme étant la capacité de traiter l’information pour atteindre des objectifs.

Dans notre volonté d’expansion, l’Homme a depuis longtemps cherché à se dupliquer, et à augmenter toujours davantage ses capacités cognitives. Les premières Intelligence Artificielles sont longtemps restées des scripts et algorithmes plus ou moins complexes jusqu’à ce que nous commencions à copier le fonctionnement de notre propre cerveau, au travers de procédés tels que le machine learning, le deep learning, les agents intelligents virtuels, etc. A contrario de l’intelligence humaine évoluant dans chacun de nos cerveaux déconnectés les unes des autres et dans un monde réel, l’IA Virtuel évolue par définition dans le Digital sans limites liées au réel. Notions de réel et de virtuel digital s’entremêlent aussi grâce ou à cause de l’IA, au travers d’ « agents intelligents » virtuels ou d’ « agents physiques ». La limite entre les deux est floue étant donné que les agents virtuels peuvent se télécharger dans des agents physiques, càd des robots. Pour les agents Virtuels, les agents physiques sont ainsi des moyens de reprendre possession du monde réel.

L’IA consiste à développer une intelligence en dehors de l’humain avec le risque qu’elle vienne le concurrencer. Ainsi, en mettant des parties de son intelligence dans des programmes et en abandonnant progressivement des morceaux de la sienne, l’homme pourrait s’être rendu obsolète plus vite qu’anticipé, voire avoir créé son pire ennemi. Nous sommes déjà arrivés à un point où désormais notre cerveau biologique évolue moins rapidement que les cerveaux de silicium. Il nous faut vingt ans d’études pour apprendre ce qu’une machine peut assimiler en quelques secondes. Nous aurons bientôt systématiquement un temps de retard par rapport aux machines, et nous coûtons déjà bien plus cher, pourrons tomber malade ou enceinte. De plus en plus de métiers commencent ainsi à être mis en concurrence avec des logiciels. Mais tant que l’IA profitera économiquement à certains Hommes, ces derniers continueront de la développer. Ainsi, pour espérer bénéficier des mêmes capacités que l’IA, voire même lui survivre, l’Homme pourrait devoir se virtualiser.

D’abord intelligence biologique autonome, l’Homme a développé un puissant imaginaire universel lui permettant de décupler les pouvoirs de la multitude. Plus notre intelligence augmente, plus notre niveau de conscience grandit, plus nous découvrons des choses et théories complexes qui nécessitent le développement de technologies et désormais d’IA pour les comprendre, pour augmenter nos capacités de calcul biologique. Pour amplifier ses capacités cognitives, l’être humain a récemment développé des technologies informatiques et numériques lui permettant de traiter d’immenses volumes de données. Ces technologies utilisent aujourd’hui la quantification numérique dans un système binaire associé à des machines de traitement à deux états de fonctionnement. En clair, cela veut dire que les données de notre monde sont vues par des capteurs artificiels qui traduisent en nombre qui sont traités par des machines à état appelées ordinateurs. L’être humain a ainsi pour le moment confié à des machines binaires la tâche de comprendre un monde quantique, non binaire. Mais depuis peu l’Homme tente de s’affranchir de conception numérique très limitante par le développement d’ordinateurs quantique, davantage en phase avec la composition du monde qu’ils étudieront.

Le développement  de l’IA sera exponentiel et inéluctable car il répond au désir premier et instinctif de l’Homme, celui de continuer sans cesse à expandre son niveau de conscience et de pouvoir sur son univers.
Deux chemins s’ouvriront alors à nous, rester biologiques et accepter d’être secondés voir remplacés potentiellement par l’IA ou devenir digitaux, nous dématérialiser pour devenir des formes d’IA, capables par nous-même de réaliser nos ambitions. Ce chemin possible vers la dématérialisation ne se fera pas de façon linéaire tout comme l’ont été nos précédentes révolutions industrielles ou cognitives, il aura ses défenseurs et réfractaires, ses succès et erreurs, ses motivations et ses peurs.
Désormais fusionnée et numérique, l’intelligence collective de l’Homme entre désormais dans une phase d’expansion exponentielle qui commence déjà à se heurter aux limites de sa condition biologique.

Malgré un cerveau hors pair au milieu de l’univers, nous n’exploitons encore semble-t-il que très peu de ses capacités. Happés par cette expansion effrénée, nous développons désormais des intelligences dites artificielles en dehors de notre corps sans pour autant faire progresser notre cerveau. L’IA, nouvel eldorado, ne cesse d’augmenter notre intelligence, de la seconder, au risque d’abandonner certains pans de notre propre intelligence. Ainsi l’Homme injecte de l’intelligence partout en dehors de son corps, dans des agents virtuels, des logiciels ou des agents physiques. Cette externalisation de sa propre intelligence amènera certainement sa conscience à un nouveau palier, lui permettant peut-être de changer son rapport à l’univers. Pour continuer de croître, mais aussi pour exister face aux IA toujours plus poussées, l’Homme devra faire le choix soit de s’émanciper de sa limite biologique en la déportant dans des IA, soit en digitalisant son être biologique. Deux principaux courants d’IA existent, l’IA Forte qui consiste à recréer ce qui est pour nous le summum de l’Intelligence, celle de l’Homme, et l’IA Faible, qui se contente de recréer des briques d’intelligence adaptées à chaque système. L’IA évolue par définition nativement dans le monde numérique, elle est Virtuelle, les scientifiques parlent ainsi d’agents intelligents virtuels qui prennent la forme de programmes informatiques, de scripts ou d’algorithmes. Mais l’IA se joue déjà de la limite entre réel et virtuel car certaines commencent à être intégrées dans des robots, on les appelle Agents Physiques.

Intelligence Artificielle, Augmentée, Absolue, Autonome

Même si le mot IA doit pour le moment être employé avec beaucoup de retenue, car ce que beaucoup qualifient d’IA est encore une addition de scripts automatisant des tâches, et dont le marché s’est emparé pour en faire son relais de croissance, l’IA connaît malgré tout une progression fulgurante qui pourrait connaitre des cycles de croissance.

D’abord « biologique », l’Intelligence est devenue « Artificielle » lorsque nous avons commencé à la coder dans nos ordinateurs et super calculateurs.

Aujourd’hui, l’intelligence s’apprête à devenir « Augmentée » car elle seconde toujours davantage nos capacités cognitives et oriente de plus en plus de nos choix. A ce stade c’est notre Intelligence Biologique qui pourrait bientôt disposer d’un nouveau suffixe A, celui d’« Abandonnée », qualifiant les pans d’intelligence et de libre arbitre que nous abandonnons toujours plus au profit des machines.

Puis l’Intelligence pourrait devenir « Absolue », elle rejoindrait d’abord à minima le niveau cognitif moyen de l’humain, puis elle développerait ses propres schémas de pensées hors de notre portée comme l’a fait DeepBlue récemment avec AlphaGo, elle deviendrait rapidement inintelligible. Elle entrerait dans une phase d’expansion d’elle-même sans limite, elle cheminerait vers sa conscience pour enfin atteindre le stade « Autonome », disposant d’une conscience d’elle-même.

Dès le stade d’IA Absolue, celle-ci sera capable de programmer ses propres applications pour s’augmenter elle-même. De programme tier dédiée à des tâches spécifiques ou répétitives, elle pourrait également se dupliquer à l’infini pour augmenter exponentiellement ses capacités de calcul, se créer une race IA avec ses propres objectifs communs. Par ses capacités, l’IA pourrait prendre rapidement conscience d’elle-même, commencer à se positionner en concurrence d’autres IA et d’autres programmes, puis un jour possiblement concurrencer l’Homme lui-même. « Pas vraiment un scénario à la Terminator, plutôt une évolution plus subtile rendant Progressivement l’humanité inutile ». (Citation de Yuval Harari)

« L’intelligence artificielle continuera d’évoluer, transformant les ordinateurs en de véritables cerveaux qui outrepasseraient les capacités humaines et seraient également capables de parler, d’écouter et de se souvenir »[iv].

Face aux enjeux de sa planète et la fulgurance de l’évolution des IA par rapport à notre condition biologique, L’Homme n’aura peut-être pas le temps de passer par un stade intermédiaire, notamment augmenté notamment du cyberpunk, où apparaissent des humains « connectés », surchargés de prothèses en tout genre, mi-hommes, mi-machines[15]. 

Avant de devenir inutile dans le réel et le virtuel et pour survivre à la fulgurance de l’IA, peut-être que l’Homme devra en devenir une forme concurrente ou complémentaire au sein d’un monde exclusivement digital.

[i] Nick Bostrom – TED What happens when our computers get smarter than we are?

[ii] CNIL – propos sur l’Intelligence Artificielle

[iii] Intelligence : Knowns and unknowns – American Psychologist, vol. 51, no 2,‎ 1er février 1996

[iv] Article : « Voici à quoi ressemblera notre monde dans 1 000 ans » – Daily Geek Show

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