Human uploading

Human uploading

Human uploading

Nous existons dans le monde réel par l’intermédiaire de notre corps, par les interactions qu’il nous permet de transmettre à notre environnement et aux autres. Notre corps biologique, malgré les pouvoirs dont il nous dote dans le monde réel, n’est pas transportable en tant que tel dans le virtuel numérique. Nous pouvons seulement le remplacer par un avatar, un jumeau numérique, c’est-à-dire une copie numérique fidèle de notre corps ou bien une toute autre forme.

Dans le virtuel actuel, chaque avatar est créé et dirigé par une personne réelle au travers d’interfaces homme-machine ou plutôt homme-avatar tels que des écrans ou équipements de captation des mouvements, c’est-à-dire les prémices d’interfaces de virtualisation. Un avatar numérique sera encore longtemps dirigé par notre corps réel mais aussi et surtout par notre cerveau qui, un jour pourrait devenir le connecteur unique avec les mondes digitaux. Selon la profondeur d’immersion dans le virtuel, notre corps réel sera mis plus ou moins à contribution. En fait, il le sera d’autant moins que les techniques de virtualisation seront évoluées.

Au stade actuel de « réalité artificielle », mêmes les meilleures interfaces de virtualisation continuent de réclamer à notre corps de bouger nos membres, de regarder autour de nous, de presser des boutons. Se déplacer requiert encore de pousser un joystick ou de déambuler dans le périmètre très restreint de son salon. Le monde réel est encore aujourd’hui une limite dont les interfaces virtuelles ne parviennent pas encore à s’affranchir.

Nos cinq sens ne sont pas non plus tous captés ni sollicités. Nous continuons de renifler le réel, de marcher sur un corps physique qui ne correspond pas nécessairement à celui du monde virtuel que nous arpentons, nous ne ressentons pas vraiment la forme des objets virtuels que nous prenons en main car ces dernières tiennent des manettes.

Les prémices du virtuel augmenté apparaissent déjà au travers de l’évolution de ces premières interfaces, gants haptiques, simulateur d’odorat, casques de réalité virtuels et augmentés plus immersifs, etc. mais la sensation d’un équipement enveloppant son corps demeure et les interfaces avec lesquelles interagir interdit à notre cerveau de se croire totalement immergé. Au point d’ailleurs pour la plupart d’entre nous de provoquer des malaises, des maux de têtes, du « motion sickness ».

Dans le virtuel absolu, notre corps biologique resté dans le réel deviendra simple senseur auquel seront greffés des interfaces de virtualisation sensorielle. A ce stade là, tout porte à croire que seul notre cerveau sera connecté, car en s’adressant à lui directement les fournisseurs d’interfaces virtuelles s’adresseront, en un seul point, à l’ensemble de nos sens pour s’affranchir définitivement de tout autre forme d’interface. Pour l’être biologique, cela pourrait s’assimiler à un coma artificiel… ou plutôt virtualisé, une immersion totale qui tromperait l’ensemble des sens.

#hardware et software

Notre corps humain et le cerveau qu’il abrite se comportent respectivement comme un système hardware et software d’ordinateur qui auraient été conçus de manière indissociable. Si l’humanité fait le choix de continuer sa course vers la Virtualisation absolue, c’est-à-dire de ne faire plus qu’un avec lui, l’Homme va devoir abandonner son hardware à l’image de l’informatique physique passant progressivement au Cloud. La progression de virtualisation de l’Homme va consister à progressivement décorréler ces deux entités liées, le corps et le cerveau.

L’imaginaire est déjà capable de désunir notre esprit de notre corps. Nous sommes habitués mentalement à nous rêver autrement ou ailleurs, à changer de peau ou à nous en affranchir. Les programmes informatiques ont besoin d’un ordinateur pour fonctionner et se manifester, tout comme l’esprit a besoin d’un cerveau[i]. Et l’esprit peut lui-même affecter notre corps comme le numérique impacte désormais notre quotidien, nos choix et nos capacités. Mais le cerveau pourrait ne pas avoir nécessairement besoin du corps, si ce n’est pour se mouvoir dans l’espace, interagir avec et s’alimenter en énergie. C’est essentiellement ce dernier point que la dématérialisation humaine devra résoudre pour devenir parfaitement digitale.
Soit nous garderons notre cerveau, soit nous le numériserons.
Dans le premier cas nous ressemblerions aux humains larves de Matrix maintenus en vie par des tubes et du liquide amniotique, dans le second cas nous ressemblerions à un disque dur fiché dans un data center. Il n’est pas dit néanmoins que la première solution soit la plus souhaitable. Dans le premier cas vous préserveriez votre corps biologique, telle une copie physique réutilisable en cas de problème mais ce corps serait mortel, dans le deuxième cas vous vous affranchiriez totalement de votre corps biologique avec comme peur de ne plus être maître un jour de votre destin avec la peur qu’on vous copie ou qu’on vous supprime d’un simple clic.
Certes, en tant qu’êtres Humains encore biologiques ces perspectives nous effraient au plus haut point mais imaginons que nous n’ayons plus le choix, que le voyage inter planétaire ne soit pas possible, que la terre ne puisse plus subvenir à nos besoins, ferions-nous le choix d’aller dans des mondes numériques pour y poursuivre notre vie avec à la clé des pouvoirs et un confort augmentés ou préférerions nous mourir, ne plus exister tout court, sinon tenter l’au-delà pour voir si une vie existe après la mort ? Il est peut-être plus probable que vous choisiriez de vous dématérialiser d’une manière ou d’une autre pour prendre la suite de votre destin en main plutôt que de tenter la mort qui, de surcroît, effraie par instinct au plus haut point toutes les entités vivantes.

C’est bien l’Homme qui pourrait volontairement ou malgré lui passer du réel au digital.

Jean-Michel Besnier fait valoir que pour des raisons épigénétiques, les neurobiologistes estiment qu’il ne saurait y avoir de cerveau isolé comme l’imaginent les post humanistes ou transhumanistes.
Brancher son cerveau correspondrait à se couper la tête pour la brancher sur un corps artificiel, en perdrions-nous notre ressenti de nous -même ?

Notre cerveau n’est peut-être pas conçu pour comprendre les théories de l’univers, il dispose peut-être d’une structure de pensée limitée par rapport aux multiples dimensions de l’univers ?

Nous avons déjà du mal à admettre la plupart des théories de l’univers telle que la théorie des cordes ou encore la logique quantique permettant l’existence simultanée d’états de matière distincts à plusieurs endroits, plusieurs temporalités. Digitaliser le cerveau de l’homme sous-entend il faire passer l’homme entier dans le virtuel ? Où est l’âme ? Ce serait considérer que la conscience de l’homme est contenue exclusivement dans son cerveau.

Après être parvenu à virtualiser ses cinq sens, l’Homme pourrait souhaiter poursuivre sa progression de dématérialisation dans le Virtuel et décider d’y brancher son connecteur biologique ultime, son cerveau. Le cerveau humain est un organe très énergivore qui consomme près de 20% de la consommation énergétique du corps alors qu’il ne pèse que 2% de son poids. Tour de contrôle / centre névralgique de nos cinq sens, générateur de notre intelligence, de nos émotions, de nos sensations et peut-être de notre conscience, le cerveau est si l’on parvient à le connecter au Virtuel le moyen le plus avancé biologiquement pour ressentir et interagir avec ce dernier.

Les connexions Homme-machine sont déjà une réalité. La société Neuralink[ii] fondée par Elon Musk connecte dès 2021 le cerveau de personnes paralysées ou handicapés à des réseaux de neurones leur permettant de communiquer directement avec des machines. Leur permettant d’agir avec des machines rien qu’en y pensant.
Le développement des interfaces d’augmentation cérébrale n’intéressera le grand public qu’une fois qu’elles permettront de réaliser des tâches supérieures à la normale. Les premières greffes d’IA limitées rendront d’abord de fiers services aux personnes déficientes leur donnant l’espoir de rejoindre les capacités cognitives moyennes.
Mais l’augmentation de puissance des connecteurs cérébraux pourrait facilement engendrer une course à l’intelligence qui pourrait vite devenir une course à la supériorité. Une course qui pourrait renforcer les clivages entre classes aisées, capables de s’augmenter exponentiellement, et classes moyennes ou pauvres devant se contenter d’interfaces d’augmentation moindres.

Arrivé au stade de Virtuel Absolu, notre principal connecteur au virtuel sera notre cerveau. Il demeurera alors le dernier élément biologique réel, avant qu’une étape ultime ne parvienne à transplanter notre conscience et notre intelligence dans le virtuel. Si nous choisissons de nous digitaliser en préservant nos cerveaux connectés à une forme de matrice, la limite de la Réalité Digitale ne sera pas la puissance technologique mais bien la puissance et les capacités de nos cerveaux. Il est réputé que le cerveau biologique dispose de capacités infinies mais nous avons encore bien du mal à le comprendre et à le manipuler. Nous dématérialiser sous forme totalement numérique aurait l’avantage de nous affranchir des besoins énergétiques du cerveau biologique tout en nous donnant la capacité d’augmenter perpétuellement et indéfiniment nos puissances de calculs. 

Pour que le Virtuel nous immerge, nous trompe ou nous augmente, il lui faudra d’abord convaincre notre cerveau. Et donc préalablement le comprendre.
Des sociétés parviennent déjà à modéliser des parties de cerveau pour en comprendre les mécanismes. De premières interfaces neuronales permettent d’actionner un bras ou jambe artificiel, d’autres permettent à des aveugles de voir des bribes de couleurs et de lumières. Nous apprenons lentement mais sûrement à dompter notre cerveau et il y a seulement vingt ans ces évolutions n’étaient pas envisageables.
Il est donc probable que les futures technologies parviennent à nous immerger totalement, à déconnecter notre cerveau de notre réalité première pour l’immerger dans d’autres réalités créées par l’Homme.
Lui faire ressentir un corps Virtuel, lui donner l’impression d’une immersion totale coupée du réel, remplacer nos cinq sens, lui faire oublier le temps qui passe à l’image de l’Inception, amplifier notre champs de vision, difficile encore d’estimer jusqu’où le cerveau humain pourra aller, ce qu’il sera capable d’assimiler et d’encaisser, de surcroît à une vitesse vertigineuse à l’échelle de l’évolution biologique. Les risques peuvent être énormes et les processus de validation prendront du temps, sans compter les nécessaires obstacles philosophiques, éthiques, politiques, techniques, … qui jalonneront le développement de ces interfaces neuronales de virtualisation.

« N’importe quel aspect de l’apprentissage ou tout autre manifestation de l’intelligence peut en principe être décrit avec une précision telle que l’on pourra assembler une machine permettant de la modéliser » (1er colloque sur l’IA en 1956). L’idée d’un humain machine émergeait déjà depuis.

La dématérialisation de notre cerveau a déjà inconsciemment débuté. Comme le rappelle Raymond Kurzweil, futurologue américain, nous déléguons déjà une partie de nos fonctions cognitives à des machines telles que nos smartphones qui stockent pour nous numéros, formules, mémos, histoire personnelle. Ce dernier annonce que nous serons très bientôt capables d’externaliser une partie de nos fonctions cognitives sur des interfaces numériques. Notre mémoire voire même notre personnalité. Il ajoute que l’ensemble de nos expériences avec un rapport au réel. Tout ce qui encombre notre cerveau, les numéros, les formules, l’histoire, la mémoire personnelle seront contenus dans des interfaces virtuelles. Le cerveau libéré de toutes ces informations peu utiles va être en mesure de recentrer sa valeur ajoutée sur des créations et opérations mentales qui pourraient décuplées encore notre révolution technologique, scientifique, etc.
« L’interface homme machine n’existera bientôt plus, c’est la machine qui intègre nos corps et nos esprits »[iii].

L’humanité se dirige vers une conscience universelle.

L’émulation du cerveau entier appelée « Mind uploading » en anglais, est souvent appelée de manière informelle « chargement », « téléchargement », « transfert » d’esprit, incluant la mémoire à long terme et le soi. Elle est certes régulièrement traitée dans nombre d’œuvres de science-fiction mais désormais également dans des études scientifiques de plus en plus nombreuses[iv].  L’idée de base est de prendre un cerveau en particulier, de scanner sa structure en détail et de construire un modèle de logiciel qui est si fidèle à l’original que, lorsqu’il est exécuté sur le matériel approprié, il se comportera essentiellement de la même manière que le cerveau d’origine. L’ordinateur pourrait alors exécuter un modèle de simulation du traitement de l’information du cerveau, de telle sorte que celui-ci réagisse essentiellement de la même manière que le cerveau d’origine. L’ordinateur serait alors capable d’expérimenter la conscience[v]

La mise en ligne de l’esprit peut alors potentiellement être réalisée par l’une des deux méthodes suivantes : copie avec transfert ou remplacement progressif des neurones. Dans le cas de la première méthode, le téléchargement des idées serait réalisé en scannant et en cartographiant les principales caractéristiques d’un cerveau biologique, puis en copiant, transférant et stockant cet état d’informations dans un système informatique ou un autre appareil informatique. Le cerveau biologique pourrait ne pas survivre au processus de copie. L’esprit simulé pourrait se trouver dans une réalité virtuelle ou dans un monde simulé, soutenu par un modèle de simulation corporelle anatomique en 3D temps-réel. Alternativement, l’esprit simulé pourrait résider dans un ordinateur qui est à l’intérieur ou connecté à un robot non nécessairement humanoïde ou un corps biologique.

Parmi certains futuristes et au sein du mouvement transhumaniste, le téléversement d’esprit est traité comme une technologie de prolongation de vie. Certains pensent que le téléchargement d’esprit est la meilleure option actuelle de l’humanité pour préserver l’identité de l’espèce, par opposition à la cryptographie. Un autre objectif du téléchargement d’esprit est de fournir une sauvegarde permanente à notre « fichier d’esprit », de permettre des voyages dans l’espace interstellaire, et un moyen pour la culture humaine de survivre à une catastrophe mondiale en faisant une copie fonctionnelle d’une société humaine dans un cerveau virtuel.

L’émulation du cerveau entier est considérée par certains futuristes comme un « point de terminaison logique » des domaines de la neuroscience computationnelle et de la neuroinformatique, tous deux axés sur la simulation du cerveau à des fins de recherche médicale. Il est discuté dans les publications de recherche sur l’intelligence artificielle en tant qu’approche de l’IA forte. Une intelligence informatique, telle qu’un téléchargement, pourrait penser beaucoup plus vite qu’un humain biologique, même si elle n’était pas plus intelligente. Selon les spécialistes de l’avenir, une société de téléversements à grande échelle pourrait donner lieu à une singularité technologique, ce qui signifie une diminution constante du temps de développement exponentiel de la technologie. Le téléchargement d’esprit est une caractéristique conceptuelle essentielle de nombreux films et romans de science-fiction.

Des travaux de recherche généraux et substantiels dans des domaines connexes sont en cours dans les domaines de la cartographie et de la simulation du cerveau des animaux, du développement de superordinateurs plus rapides, de la réalité virtuelle, des interfaces cerveau-ordinateur, de la connectomique et de l’extraction d’informations à partir de cerveaux fonctionnant de manière dynamique. [6] Selon les supporters, de nombreux outils et idées nécessaires à la réalisation de mind upload existent déjà ou sont en cours de développement ; Cependant, ils admettront que d’autres sont, à ce jour, très spéculatifs, mais restent dans le domaine des possibilités techniques. Le neuroscientifique Randal Koene a formé une organisation à but non lucratif appelée Carbon Copies (Copies du carbone) pour promouvoir la recherche sur le téléchargement de fichiers de données.

[i] L’intelligence Artificielle en images – Henry Brighton et Howard Selina – edp sciences

[ii] https://neuralink.com/

[iii] Hervé Juvin – conférence au Parlement de Bruxelles – 31 janvier 2017

[iv] Whole Brain Emulation, A Roadmap – (2008) Technical Report #2008‐3 – Anders Sandberg & Nick Bostrom – Future of Humanity Institute – Faculty of Philosophy & James Martin 21st Century School – Oxford University

[v] A framework for approaches to transfer of a mind’s substrate – Sim Bamford

work in progress

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Les voies de digitalisation

Les voies de digitalisation

Les voies de digitalisation

Pour dépasser les limites inhérentes à son monde réel, l’Homme pourrait choisir de quitter un jour son corps biologique, il digitalisera son existence pour la rendre sans limites et donc poursuivre indéfiniment son expansion de conscience.

L’humain ne passera peut-être pas par l’étape Cyborg, c’est à dire humain augmenté de capacités, il pourrait devoir se dématérialiser bien plus vite pour démultiplier ses capacités afin de répondre à sa volonté de croissance et la pression des IA Fortes qui auront la capacité d’évoluer simultanément dans le virtuel et le réel. Les contraintes de son monde réel l’incitent déjà à dématérialiser la plupart de ses technologies. Les limites de son enveloppe biologique pourraient bientôt l’inciter à s’en séparer.

Passer dans le virtuel, se dématérialiser permettrait à l’homme de s’affranchir de cinq des six principales contraintes de son corps, son organisme, ses muscles, son squelette son système cardio-vasculaire, son système immunitaire. Resterait sa psychologie. Le prix à payer pour aller vers la puissance d’un Dieu, créateur et maître de ses propres mondes, serait d’abandonner son corps mais, pour un être biologique, quitter son corps ou le mettre de côté en branchant son cerveau, pourrait le rendre encore plus vulnérable qu’il ne l’est.
Couplé au fait de quitter son monde réel, tel un astronaute sortant de la gravitation terrestre, l’être humain n’aurait plus vraiment les caractéristiques d’un être humain.
Prendrons-nous la place des machines ou les machines prendront elles notre place ? Le numérique est-il notre seule issue ou bien existe-t-il d’autres états dans lesquels l’Humain pourrait se dématérialiser ? Fera-t-on le choix de quitter nos enveloppes biologiques ou bien de les augmenter jusqu’à ce que la frontière entre biologique et digitale soit si ténue qu’il devienne impossible de les dissocier ?

La première étape est très actuelle, notre réalité s’est considérablement complexifiée de contraintes, normes, règles, … et notre monde surexploité et surpeuplé nécessite d’être rationalisé toujours davantage. Nous démultiplions les prouesses technologiques pour tenter de le comprendre et de l’exploiter à l’optimum, récemment pour tenter de le préserver… A ce stade, la technologie accompagne l’Homme au quotidien dans ses activités professionnelles, artistiques, personnelles et de loisir. Parallèlement l’Homme devient de plus en plus dépendant, rivé chaque jour toujours davantage à des écrans, interfaces et capteurs.

Dans un second temps peut-être pas si lointain, les IA et les mentalités continuant d’évoluant sans cesse, les technologies exerceront une pression grandissante sur la société humaine tout en lui ouvrant des perspectives de divertissement et d’évolution sans précédent. L’Homme pourrait alors faire le choix de s’augmenter biologiquement et artificiellement pour rester compétitif face à la machine. Il deviendrait Homme augmenté, bardé de capteurs et de puces branchées à son cerveau. Son environnement bâti suivant le même processus de connectivité. Mais l’augmentation des capacités cognitives et des possibilités offertes par le digital pourraient exacerber les besoins de l’Homme et renforcer encore davantage la sensation de se sentir à l’étroit dans sa réalité actuelle.

Deux chemins vers la digitalisation pourraient se dessiner. Ils pourraient n’être que des étapes ou bien coexister en opposition ou bien parallèlement : 

#1 Le premier chemin est celui de l’augmentation biologique. L’Homme ferait le choix de s’augmenter tout en demeurant dans son enveloppe biologique initiale, donc physiquement dans la réalité actuelle. L’homme continuerait à s’augmenter jusqu’à devenir une forme de machine pouvant se connecter instantanément aux mondes virtuels mais son cerveau demeurerait sur un socle biologique. L’Homme pourrait rester vivant dans le réel et créer une copie digitale de soi transplantée dans une matrice Virtuelle ou une enveloppe artificielle.

#2 Le second chemin serait celui de la dématérialisation digitale impliquant l’abandon total du corps biologique au profit d’autres réalités virtuelles crées par l’Homme ou les machines. L’Homme se transfère dans le digital, il sort totalement de son état biologique, sa conscience est une copie numérique prête à accueillir des augmentations et préparée à la vie éternelle. L’Homme ne peut plus être qualifié d’humain car son enveloppe corporelle peut désormais prendre la forme de multiples enveloppes virtuelles. L’Homme pourrait également réinjecter sa conscience dans une voir des machines robots arpentant notre monde Réel actuel et le Virtuel. Une conscience unique devient multiple dans une variété de corps numériques. La personnalité serait multiple, ce serait la fin de la notion d’Homme unique.

Puis ultérieurement, l’Homme pourrait atteindre un niveau technologique et de conscience suffisamment avancé lui permettant de rejoindre un état non plus seulement numérique mais quantique, proche de la matière data constituant notre 1er univers, il deviendrait une conscience d’état de matière généralisée, une forme de dieu capable d’agir sur le monde réel et virtuel simultanément ? L’être humain aurait gagné le pouvoir de réplication infinie et éternelle


La digitalisation de l’Homme pourrait suivre le même chemin que celui de l’Intelligence. D’abord « biologique », désormais « artificielle », puis « augmentée », elle pourrait devenir « absolue » puis « autonome », laissant derrière elle une réalité abandonnée ?

#Virtuel biologique

Le Virtuel « biologique » peut-être associé à notre imaginaire qui demeurera encore pour longtemps le plus puissant et illimité de tous les vecteurs de projection fictionnelle. Celui-là même qui me fait écrire ce livre et imaginer des futurs potentiels, celui-là même qui vous propulse souvent pendant le jour et vos nuits dans des mondes quasi palpables construits par la simple puissance de votre esprit et de vos émotions.

#Virtuel artificiel

Le Virtuel d’aujourd’hui est à un stade que nous pourrions qualifié d’ « Artificiel », il se vit au travers d’interfaces peu naturelles pour l’Homme et d’écrans aux périmètres plus ou moins rectangulaires qui nous renvoient un sentiment d’Artifice et d’immatérialité des contenus. Jeux vidéo et expériences ludiques numériques évoluent certes très vite mais présentent encore des niveaux de réalisation et d’interactivité qui ne nous immergent pas encore pleinement, ne nous déconnectent pas complètement de notre réalité. En parallèle de ce virtuel artificiel qui progresse, nous déléguons de plus en plus de nos tâches physiques et intellectuelles aux machines et ordinateurs. Nous abandonnons certains pans de notre Intelligence biologique réelle au profit de machines qui deviennent quant à elles augmentées. De même, nous abandonnons de plus en plus de notre temps réel au profit de mondes virtuels. Nous semblons ainsi abandonner progressivement notre réalité au moment où elle a le plus besoin de nous. Notre intelligence et notre temps qui forment une importante partie de notre perception de la réalité se retrouvent ainsi progressivement abandonnés au profit de mondes Virtuels qui pourraient ainsi devenir Augmentés.

#Virtuel augmenté

Le virtuel a le potentiel à augmenter l’Humain, à lui donner des super pouvoirs, ou parfois lui faire regagner les facultés désapprises pendant son évolution. Ce stade d’évolution du virtuel sera caractérisé par deux facteurs, la qualité d’immersion et la progression du nombre d’humain ayant souscrit aux mondes virtuels. La réalité augmentée se développe très rapidement, le virtuel se mixte à notre monde réel pour l’augmenter. En parallèle, la réalité virtuelle devient toujours plus englobante, plus immersive, elle gagne chaque année en maturité pour augmenter sans cesse nos capacités d’interactions avec les mondes virtuelles auxquels elle permet d’accéder. Ainsi, réel et virtuel deviennent « Augmenté » en se projetant partout dans notre monde réel, en l’augmentant. En moins de dix ans nous passons désormais le plus clair de notre temps plongés dans nos smartphones qui eux-mêmes deviennent rapidement des interfaces de réalité augmentée pour vous aider au quotidien à trouver votre chemin – tel Google Maps AR, pour nous divertir – telles les applications d’AR dans les stades, nous faire voir les choses autrement – telles des applications d’explication du corps humain, pour nous faire travailler plus efficacement – telle des applis de réalité augmentée pour la maintenance des avions ,etc. Le réel Augmenté sera une étape charnière car, en transformant notre perception du réel et en nous donnant de nouveaux pouvoirs, donc de nouvelles habitudes, le Virtuel pourrait remporter l’adhésion en masse et convaincre l’humanité de passer à la troisième étape, celle d’un Virtuel « Absolu ».

#Virtuel absolu

Devenu une partie de nous, car nous immergeant à chaque instant de nos vies, le Virtuel rentrera dans sa phase « absolue ». Nous y passerons le plus clair de notre temps et surtout il sera devenu global, il aura absorbé la quasi-intégralité de l’Humanité qui s’y retrouvera pour travailler, se divertir, voire même s’y reproduire ? Ce Virtuel absolu nous offrira ce que le réel par définition limité ne peut nous offrir, c’est-à-dire des espaces infinis, des choix multiples, des pouvoirs qu’on associait il y peu à Dieu, des interactions décuplées avec les autres, des avenirs potentiellement multiples. Le Virtuel Absolu repose sur les mêmes principes que l’IA Forte, c’est à dire qu’il considère l’humain comme un « ordinateur complexe » totalement virtualisable, dont il est donc possible de numériser et dématérialiser l’intelligence, les émotions, la conscience, voir même les pensées et les capacités d’imaginaire. Au même titre que l’Intelligence Artificielle dispose de sa théorie générale ayant pour objectif de proposer une augmentation ou une substitution d’intelligente pour tous les individus et toutes les entités, la virtualisation pourrait elle-même vouloir être générale et globalisante avec pour objectif d’embarquer tous les êtres humains, animaux, entités végétales mais aussi robots ou plutôt IA.

#Virtuel autonome

Le développement des IA étant inarrêtables, et ayant appris grâce à l’Homme à comprendre et créer des mondes virtuels, il arrivera un moment, anticipé par certains vers les années 2080 – 2100, où ces dernières pourraient devenir Autonomes. Ces Intelligences Autonomes pourraient alors devenir conceptrices de mondes virtuels et davantage d’ailleurs pour leur propre compte que pour le nôtre si nous venions à ne pas anticiper ces phénomènes.  L’un de ces plans de développement pourrait être de se créer un ou des monde(s) à leur « image ». C’est ce que nous explorerons dans le dernier chapitre de ce livre. Ces mondes pour créés par et pour les machines pourraient totalement échapper à nos capacité de compréhension et de vie.

#Réalité abandonnée

Dans l’hypothèse où l’espèce humaine serait en quasi-totalité « dématérialisée », le monde réel pourrait alors n’avoir pour seul rôle que de maintenir en vie notre corps biologique. Nous serions sous perfusion virtuelle, notre esprit pourrait petit à petit ne percevoir la réalité que comme un des multiples virtuels possible, une énième expérience parmi d’autres. Le monde réel, parce qu’il aurait perdu sa saveur en comparaison de ces mondes virtuels absolus, et parce qu’il nous ramènerait sans cesse à notre fragilité terrestre, pourrait alors devenir le monde le moins enthousiasmant de tous à parcourir, le plus risqué pour y établir sa vie, celui dans lequel on aurait le moins de pouvoirs, le moins de perspectives de divertissement, le moins de rencontres et d’avenir professionnel.

Si l’Homme venait à quitter en tout ou partie son monde réel et son corps biologique, cela se ferait-il au détriment de ces derniers ? Très certainement. Abandonner le réel, c’est fuir les responsabilités que ces derniers nous imposent.

Les super pouvoirs du Digital

Les super pouvoirs du Digital

Les super pouvoirs du Digital

 Dépasser la vitesse du son, aller sur la lune, passer un appel vidéo à l’autre de la terre. Impossible ? Non, nous le faisons déjà dans le réel. Créer une infinité de mondes ? Se déplacer instantanément d’un bout à l’autre de la galaxie ? Vivre au temps des pharaons ? Rencontrer des extraterrestres, fuir devant un dinosaure, emprunter une voiture volante dans NY au 23eme siècle ?  Impossible ? Non, nous le faisons déjà dans notre imaginaire mais aussi, et c’est tout nouveau à l’échelle de l’évolution, dans le virtuel. Pendant nos soirées cinéma, dans nos jeux vidéo, ou bien la tête dans notre casque de réalité virtuelle et les mains dans des gants de virtualisation sensorielle.

L’imaginaire développé à la lecture d’un livre ou à l’écoute d’une musique est désormais rejoint par le développement ultra rapide des technologies et interfaces d’immersion virtuelles qui commencent à rendre quasi réel les mondes imaginaires qu’elles développent. Les mondes virtuels que nous créons sont déjà des moyens pour nous de tester nos limites et surtout de les dépasser, de tester l’impossible et surtout l’interdit, nous goutons aux plaisirs virtuels de plus en plus souvent et ces derniers nous confrontent toujours davantage aux limitations de notre monde réel.

Depuis la naissance, notre imaginaire nous a toujours permis de nous projeter dans des mondes dans lesquels nous pouvions surpasser nos limites ou nos peurs, nous sommes accros à nous rêver plus grands, plus forts, plus riches, plus puissants. Avec l’arrivée des technologies de virtualisation nous pouvons expérimenter ces pouvoirs non plus isolément mais en communautés et augmenter là encore notre addiction à l’expansion. Les technologies virtuelles liées au web ont ainsi la capacité à faire vivre une même expérience à une multitude. Ainsi elles transposent des milliers de spectateurs virtuels sur le fauteuil du premier rang du central de Wimbledon, transposent nos avatars sur le terrain du Wembley Stadium en plein match.  L’apothéose de ces technologies de virtualisation de masse sera certainement lorsque nous marcherons tous virtuellement dans les pas des premiers astronautes sur mars. De telles épopées humaines s’appuieront sur les technologies de réalité virtuelle et de virtualisation pour nous les faire vivre ensemble et à échelle réelle. Dès lors que les technologies de réalité virtuelle et de virtualisation sensorielle auront atteint un stade suffisant d’immersion, de réalisme et de confort, nous pourrions ne plus avoir systématiquement besoin de nous déplacer, nous pourrions même nous passer de nos astronautes. De simples robots munis de caméras et senseurs pourront déambuler à la surface des planètes ou des astéroïdes, y compris les plus hostiles, tout en permettant à chacun de vivre l’expérience à distance, et tous ensemble. Un seul robot pourra emmener avec lui des millions d’humains connectés, tous virtualisés dans un seul corps mécanique.

Nos technologies actuelles nous permettent déjà de dépasser nos limites humaines biologiques et nous donnent déjà quelques pouvoirs. Depuis longtemps la télévision nous fait voyager sans se déplacer, nous fait vivre des expériences, certes peu immersives et seulement contemplatives mais néanmoins déjà puissantes. En moins de cinq ans les progrès de la réalité virtuelle sont déjà tels qu’il est tout à fait pensable qu’en quelques décennies de plus, la technologie nous donnera pleinement l’impression d’être sur place, de faire corps avec l’expérience. En un clic, un geste ou une demande orale vous serez transposés au fond de la fosse des Mariannes, sur une plage des caraïbes, sur l’Olympus Mons de la planète mars. Le virtuel dispose de nombreux pouvoirs. Ainsi il n’est pas lié à des ressources physiques et des problème de stocks. Les mondes digitaux ont une matière infinie, alors que le réel est un espace fini. Lorsque étendre notre espace vital sur la mer prend des années de construction et des ressources considérables, dans un espace digital construire une planète ne prend seulement que quelques semaines de programmation. Le Virtuel donnera le don d’ubiquité, l’impression puis la sensation de pouvoir être partout tout le temps. En cela il surpasse largement les capacités que la réalité peut offrir. Dans les mondes numériques, l’être humain y exerce des capacités qu’il ne parvient pas à mettre en œuvre dans la réalité. Il s’y sent valorisé. Il peut en devenir dépendant.

Notre imaginaire, nos rêves, nos sensations, nos sentiments, nos émotions sont propres à chacun de nous et notre seul moyen de partager les expériences que nous y vivons sont de les exprimer ou les matérialiser en les écrire, les dessines. Le numérique dispose d’un pouvoir supplémentaire à l’imaginaire qui est de pouvoir véhiculer la même expérience, les mêmes images à tous les humains. Cela fait-il des mondes virtuels un média plus puissant que notre imaginaire, ou bien quelque chose de plus machiavélique, de plus destructeur de l’imaginaire de chacun ? Malgré son caractère universel, le support digital, même s’il tâche de structurer de façon équivalente tous les imaginaires, n’offre pas les mêmes sensations à chacun, cela relevant de notre humeur du moment (dictée principalement par les éléments réels). Si nous étions amenés à vivre dans un univers totalement virtuel et que notre environnement réel avait donc moins d’impact sur nous, le Virtuel aurait-il alors davantage d’emprise sur nous, arriverait-il à uniformiser nos sensations ? Le virtuel pourrait-il alors driver à la fois notre imaginaire et notre ressenti ? Se cacher sous la couette en pensant aux monstres rencontrés dans le jeu Day’s Gone ou dans le dernier film de Saw, vouloir embrasser une carrière de pilote de chasse après avoir vu Top Gun et joué à Ace Combat, motiver des études d’avocat après avoir regardé un homme d’exception ou en ayant fini le jeu Professeur Layton. Le pouvoir du virtuel sur l’imaginaire n’est pas nouveau, il peut rester longtemps gravé dans notre mémoire et peut donc influencer nos décisions et actes dans le monde réel.

Le Virtuel sait se parer de tous les artifices pour véhiculer des idées, des dogmes. Ce que le réel sait moins faire. Il n’est pas un socle numérique sur lequel il est facile et quasi instantané de créer des illusions. Dans le réel, les illusions sont portées par les hommes et quelques supports graphiques ce qui en limite implicitement la propagation. La réalité augmentée qui envahira prochainement notre réel permettra d’y projeter à loisir une infinité de messages.

 » Il y a tellement de choses qui se passent dans le monde réel, tout est connecté par internet mais d’une certaine façon nous ne sommes plus vraiment connectés au monde réel. […] Je veux que les gens pensent à leur vie, prennent du recul, qu’ils regardent notre monde réel autrement et qu’ils se disent, ah oui c’est ça la connexion ou la déconnexion de notre monde « [i].

Nos écrans nous attirent sans cesse davantage, toujours plus grands et beaux à regarder, affichant des simulations 3D sans cesse plus réalistes et confortables à expérimenter, ils captent toujours plus de notre temps réel que nous consacrons alors à ces contenus virtuels. Ces fenêtres vers le virtuel deviennent, avec l’apparition des technologies de réalité virtuelle et augmentée, des portes. Ces dernières nous projettent à l’échelle réelle au sein du virtuel, gommant par la même la notion d’écran délimité dans un cadre. Non ici le visiteur virtuel est au centre de la scène virtuelle, il peut tenter de tourner sur lui-même pour s’en échapper, il est bel et bien totalement immergé. En complément de ces interfaces d’immersion visuelles sont apparues presque simultanément des appareils de manipulation virtuelle rendant le visiteur non plus seulement spectateur mais aussi et surtout acteur. Nos mains manipulent le virtuel, nos jambes bougent et nous font avancer, renforçant là encore la sensation d’immersion.

Le virtuel étant par définition dissocié du réel, il est tentant et de plus en plus facile de venir y chercher une forme de refuge, d’abord une courte déconnexion des contraintes réelles, pouvant se transformer en habitude puis possiblement en constante de vie. Mais bien sûr le Virtuel attire aussi par ses travers. Certains d’entre nous, une minorité, voient dans la connexion à des espaces virtuels ou à la plupart des jeux vidéo, un moyen de se désinscrire de tout ce qui nécessite le vivre ensemble physiquement. Pour eux, le Virtuel est moins un espace attirant qu’une tentative d’évasion de leur réalité sociale trop brute dans laquelle ils se sentent congestionnés, en perte de repères. Le Virtuel devient pour eux un moyen d’exacerber leur individualité loin du regard réel des autres, un moyen de croire que tout y est possible.

[i] Propos d’Hideo Kojima lors d’une conférence du festival Tribecca Film Festival de New-York, sur sa dernière création Death Stranding

L’expansion du virtuel

L’expansion du virtuel

L’expansion du virtuel

Le développement du Virtuel, de ses technologies, de ses interfaces, de ses univers est mondial, fulgurant, exponentiel. Les interfaces et mondes virtuels font déjà partie prenante de notre quotidien et ne cessent d’accaparer toujours davantage de notre temps réel.

Dans un futur proche, les interfaces de réalité virtuelles et augmentées seront la norme, chacun disposera d’une paire de lunettes de réalité augmentée et d’interfaces de réalité virtuelle comme on possède aujourd’hui une banale paire de lunettes ou une télévision dans son salon. Cette intrusion grandissante des technologies virtuelles nous incite déjà toujours davantage à quitter notre monde réel pour s’immerger toujours plus loin et plus longtemps dans les mondes virtuels.

Les interfaces de virtualisation et les mondes virtuels se banaliseront comme l’on fait auparavant le cinéma, la télévision, le téléphone et même récemment le jeu vidéo. Volontairement ou malgré nous, nous apprenons à vivre avec ces myriades d’interfaces numériques qui nous entourent, maintenant nos smartphones, tablettes, écrans de toutes tailles et très bientôt nos casques de réalité virtuelle et lunettes de réalité augmentées. La plupart de nos activités personnelles ou professionnelles passent désormais par ces interfaces écrans. Travailler, échanger, écrire, dessiner, lire, se divertir, chercher son chemin, se déplacer, faire ses courses, se tenir informés de l’actualité, dessiner le plan de sa maison, etc. la plus grande partie de nos activités se sont en quelque sorte digitalisées. Il existe désormais des applications pour à peu près tout et des capteurs en tous genres viennent compléter l’arsenal de notre connectivité. Depuis seulement quelques dizaines d’années, c’est-à-dire rien à l’échelle de son évolution, notre corps biologique, et prioritairement nos yeux, doivent désormais s’adapter à l’ensemble de ces nouveaux espaces de virtualisation qui, parce qu’ils y regroupent la plupart de nos activités, de nos amis et collègues, pourraient bientôt devenir les principaux points de rencontre et d’évolution sociale d’une grande partie de l’espèce humaine.

Le virtuel ne cesse de devenir toujours plus accessible, plus immersif, plus palpable, son déploiement est exponentiel, mondial, il touche toujours plus de monde, de catégories sociales. Il ne cesse de croître et de nous donner de nouvelles facultés. Par les capacités et super pouvoirs qu’il donne, le virtuel pourrait y aspirer une bonne partie de l’humanité, voir pourquoi pas sa totalité. Il a déjà commencé à nous happer dans ses histoires, ses expériences, dans ses mondes, il pourrait devenir notre future réalité. La 5G amene la réalité augmentée partout avec nous. En vous promenant dans les rues de Londres vous pouvez passer un appel vidéo à 360 degrés avec un proche lui-même en train de courir dans les collines aux abords de Sydney.

Le Virtuel sera partout avec vous, il aura gagné le pouvoir d’enveloppement quasi permanent et le pouvoir d’ubiquité, disponible partout et sur tous supports. Le réel sera augmenté, envahi et métamorphosé par le virtuel. À l’image de cette vidéo quasi parodique d’Hyper Reality[i] , de l’artiste japonais Keiichi Matsuda qui nous projeté dans un monde sur virtualisé ayant fini d’affadir complètement le réel, ce dernier ne servant plus qu’à être le support du virtuel avec des QR codes partout pour que les technologies de réalité augmentée puissent s’y greffer. A un point où nous ne pourrions plus nous satisfaire du réel seul, sans augmentation visuelle ou sonore.

Imaginez un univers enveloppé par le digital, si réaliste que vous ne pourriez en discerner la virtualité. Un univers fait de milliards de polygones 3D, de textures hautes fidélité, de son surrond et de capteurs sensoriels qui si vous êtes immergé vous donne non plus l’impression mais bien la sensation d’exister ailleurs et de pouvoir exister partout. Imaginez que vous puissiez entrer dedans d’un simple mouvement, le modeler à votre guise et y rencontrer vos amis, vos collègues ou famille même si ceux-ci sont à des milliers de kilomètres de vous. Choisiriez-vous de demeurer cramponné à la réalité ou bien vous laisseriez vous tentés par des immersions de plus en plus fréquentes et bientôt quasi permanentes ? Les mondes virtuels que vous visiteriez et dans lesquels vous décideriez d’habiter, deviendraient votre nouvelle réalité, celle également d’une majorité de vos semblables ayant choisi de virtualiser une part toujours plus importante de leur temps et de leur existence. Arpenter ces mondes digitalisés donnerait l’impression de fouler le sol de nouvelles planètes, procurerait une excitation de la découverte permanente, mais aussi possiblement une lassitude constante, un besoin irrépressible de nouveauté perpétuelle.

Les plus grandes révolutions humaines se passent sans que l’on s’en rende vraiment compte. On multiplie des habitudes de comportement ou on adopte de nouvelles façons de penser, des nouvelles techniques de travail, de déplacement ou de divertissement et tout d’un coup tout a changé. Vous expérimentez chaque jour des couples ou personnes dans la rue qui même l’une en face de l’autre ne vont plus se parler mais regarder chacune de leur côté leur smartphone. L’humain est en train, sans vraiment s’en apercevoir, d’intermédier par le digital ses relations avec les autres. L’être ici, l’être là et l’être ensemble sont bouleversés par nos smartphones.
Nous sommes présents physiquement mais notre conscience est ailleurs. Les rapports aux autres, au temps et aux lieux sont métamorphosés par des technologies telles que les réseaux sociaux qui donnent l’illusion d’une proximité avec les autres.
« Les technologies deviennent des prothèses du corps et de l’esprit qui posent la question de savoir si ces outils ne finissent pas par nous commander. » Petit à petit nos actions du quotidien et nos manières de penser changent, évoluent par le biais des technologies qui ont envahi notre quotidien.
De même nous parlons de plus en plus à nos assistants personnels et robots ce qui conditionne nos façons d’interagir même avec nos congénères. Nous nous habituons à interagir avec des interfaces digitales guidées par des IA et le Big data qui finissent par nous conseiller au plus près de nos désirs et habitudes. « Le robot devient une part de notre esprit »[ii].

[i] Vidéo « Hyper Reality » – Keiichi Matsuda – YouTube

[ii] Hervé Juvin – conférence au Parlement de Bruxelles – 31 janvier 2017